Tristan Alleman, Fugitives, nouvelles,éditions Traverse, 2018

 

Une trentaine de petites nouvelles, tellement nouvelles, tellement fuyantes ou fugaces ou fulgurantes, avec tellement ce désir de voir ce qui n’est déjà plus là ou qui s’est tranformé par la grâce d’une échappée de l’auteur : « Je suis le sentier merveilleux.Le sentier vers la mer et les espaces vierges.Le sentier sans fin(…)Je suis le sentier merveilleux et pourtant déjà effacé. »

En appendice du recueil, une musicographie « en référence aux musiques fugitives elles aussi, inspiratrices des divers instants , voyages, rencontres, fulgurances partagés au cours de l’écriture de ces textes. » pour chaque chapitre. On comprend mieux, pour peu qu’on s’y reporte, dans quel univers nous sommes entraînés : celui qui cherche des espaces nouveaux à explorer, quoi qu’il en soit.

Ainsi, Tristan Alleman écrit à propos de ses nouvelles :: « Osant quelques pas aveugles, vainqueurs pourtant, parce que possibles. Parce que osés ! » Quand, à la lecture, nous avons l’impression de nous installer dans le fauteuil comme le plus souvent, soudain, après quelques lignes, nous en sommes délogés. Par exemple, nous voici devant des groupes hagards qui passent en silence et l’on comprend, par petites touches, qu’ils sont à la rechreche de l’enfance perdue.

Mais d’autres nouvelles nous emmènent dans d’autres ailleurs. Par exemple, dans la nature, un dormeur se réveille avec un haut mur circulaire autour de lui et, après quelque temps, y trouve son bonheur. Ou bien cet homme qui s’envole avec un ange, lequel, après ce cadeau, l’abandonne et le laisse s’écraser sur le sol. Ou encore l’homme au chapeau : son couvre-chef lui échappe chaque fois qu’il veut le ramasser, image d’une quête inutile, celle de notre vie, peut-être.

Les nouvelles écrites à la première personne sont les plus oniriques et les plus poétiques. La femme y incarne à la fois l’eau et le vent, la nuit et l’aube, le corps et la disparition…

Enfin, ce passage où l’auteur se livre à sa manière : « L’ignorance du temps qui me frappe est merveilleusement significative. Perdant toute identité, toute empreinte digitale de pensée personnelle, un éclatement de mon corps me mène au rang des étoiles les plus belles, les plus brillantes .»

 

Dominique Dumont