Jean-Louis Massot,   L’Appareil À Fabriquer Les Aphorismes.  Mode d’emploi,                 Cactus Inébranlable éditions   (10 euros)

Dans ce livret de sa série « les p’tits cactus », l’éditeur nous confie quelques secrets de Jean-Louis Massot nous révélant la machine à fabriquer les aphorismes avec l’influence que ceux-ci peuvent avoir sur les lecteurs : « Si les consignes de sécurité ne sont pas observées, dans un périmètre égal au rayonnement sous-jacent d’un aphorisme prenant la tangente, toute personne se trouvant dans ce périmètre pourra être irradiée et même carrément radiée ».

Décrit comme un véritable mode d’emploi utilisateur de n’importe quel objet de nos consommations devenues courantes, c’est cependant, bien sûr, le cerveau libre de notre ami très inventif à de nombreux points de vue qui mène la danse de la réflexion puisque quand « un ange passe (et) c’est un aphorisme », laissant cependant la possibilité à chacun d’évoluer en ce sens et de progresser, grâce, bien sûr, au mode d’emploi concocté.

Si « derrière chaque être humain se cache un aphorisme » ; peu ont cependant la chance de pouvoir en faire un véritable moyen d’expression grâce à une pratique assidue, l’auteur étant lui-même féru de lectures bien souvent particulières éditées par ses propres soins avec les éditions « Les Carnets du Dessert de Lune ».

N’en étant pas à son coup d’essai en la matière, dans une seconde partie, Jean-Louis Massot a remis en selle, parmi les récents conçus à l’aide de son brillant procédé, les aphorismes édités par Pierre Soletti aux éditions du Soir au Matin en 2010 sous le titre de « Penser pourrir ».

Entre jeux de mots et réflexions profondes, le lecteur aura le choix de sa progression personnelle à réfléchir sur une utilité poétique ou littéraire parfois dérisoire après moultes efforts puisque « Un poète, ça ne trime à rien » même si transparait la nécessité d’une certaine qualité quand l’auteur ajoute qu’ « il y a des poètes qui méritent des coups de métrique sur les fesses » et quand il se demande si « Achille avait l’estomac dans les talons » notre culture innée pensera d’office à deux Achille entièrement différents. C’est la confrontation de la réalité et de l’imaginaire à l’acte créatif suscité par des sous-entendus qui transcende le message quand, avec ce petit livre de 60 pages on a parfois l’impression d’ouvrir une de ces femmes-commodes à tiroir peintes par les surréalistes.

On ne marche pas pour autant sur la tête, même si « marcher sur les mains dans une rue piétonne » fait avancer le récit dans un dédale de jeux de mots parfois philosophiques ou très ressentis dans les relations de proximité immédiate comme « Je ne poursuis aucun but dans ta vie ».

Jean-Louis Massot, pour qui le connait, est un amuseur public sérieux dans ce qu’il fait, précis, audacieux et, pour tout dire, exigeant autant avec lui-même qu’avec les autres.

Patrick Devaux