Agnès Sautois, Le jeune fille au clavicorde, roman, éditions Dricot. 2016.

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Depuis La jeune fille à la perle, de Tracy Chevalier, nous sommes en présence d’un certain nombre de romans relevant du même genre, que l’on pourrait appeler biographies romancées, dans lesquels la vie d’un(e) peintre, d’un(e) musicien(ne) nous est racontée sous la forme d’un roman. Un véritable roman, et non une simple biographie plus ou moins retouchée pour l’auteur.

C’est un genre moins simple qu’il n’y paraît. En effet, si le canevas est déjà donné, le genre requiert un mélange harmonieux d’érudition et de talent de conteur, de romancier. Agnès Sautois possède ces deux qualités de façon éminente. Erudition? L’excellente bibliographie qui clôture le livre le prouve à suffisance. Elle passe sans difficulté de l’Italie de la Renaissance – bientôt de l’âge classique – à l’Espagne et aux Pays-Bas. En effet, son héroïne, Sofonisba Anguissola, est l’une des rares femmes admises à l’époque au rang des peintres, et cela lui vaudra une carrière aventureuse, toute pénétrée par l’amour de la peinture, les amitiés nombreuses, notamment pour  ses sœurs et la famille royale d’Espagne – bien des chagrins aussi, car on mourait jeune, à l’époque – et l’amour venu sur le tard.

Mais cette érudition n’empiète pas sur le récit, tout se déroule d’une seule coulée. De plus, l’auteure a cette qualité rare de savoir créer une atmosphère, de pénétrer ses personnages de l’intérieur, d’en voir non seulement les mauvais côtés, mais aussi les beaux, même chez ceux que l’histoire a jugés sévèrement, comme le duc d’Albe et Philippe II. Son style, sans rien de trop appuyé, est d’une correction et d’une élégance parfaites, et fort bien adapté au sujet.

Bref, une belle réussite, et une lecture passionnante.

Joseph Bodson