Aurélien Dony, Puisque l’aube est défaite – Épitaphes, Bruxelles. M.E.0., 2014, 72 p.

aurélien donyLe titre est à deux entrées. La première dit que lorsque le jour se lève, c’est le constat d’un échec, d’une débâcle. La seconde que quand la brume matinale se dissout, la lumière paraît. L’une est tourmentée, l’autre optimiste. Les deux conviennent sans doute à un être qui se cherche, « homme en mal de sens », qui, dès le premier vers, parle de l’ « illusion d’être soi », qui s’interroge sur son identité.

Dans son autoportrait n’affirme-t-il pas qu’il est « la cape noire qui renie l’homme heureux » ?               Sa solitude – située aux confins de l’isolement et de l’esseulement dont parle si bien Hanah Arendt dans « Responsabilité et jugement » – se réfère à Don Quichotte, s’accroche à l’amitié, espère un retour du solidaire, conserve l’envie de lutter. Il se penche sur sa vie, sans doute d’abord vécue trop vite.

Pour donner corps à sa recherche mentale, exprimer les tâtonnements et les errances de ses actes, Dony préfère un vocabulaire lié au concret davantage qu’aux abstractions de la pensée. Jamais avare de métaphores, il se sent, peut-être même se sait, à l’heure du choix – défini en un alexandrin – entre « la lutte véritable ou la prompte déroute ».

Le poète navigue donc entre vide et plein, corps fracturé et corps vivant, absence et présence, ombre et clarté, espérance utopique et réalité transformable. Des obsessions thématiques et lexicales se réfèrent à Baudelaire dont l’influence s’avoue dans  « Épitaphes », seconde partie du recueil, de facture plus classique et occultant la sensibilité derrière les mots soumis à des contraintes formelles qui les brident.

Michel Voiturier