Michel Delhalle Belgique, terre d’aphorismes Tome 2  éditions Cactus Inébranlable (310 pages, 22 euros, 2024)

« Les mots rares sont les pralines de la littérature ». Ce n’est pas moi qui le dis mais Ivan O.Godfroid présent parmi les aphoristes de ce deuxième tome « Belgique, terres d’aphorismes ». Il a raison en effet, même si on fait ici appel assez souvent à d’anciennes raretés comme, par exemple, l’extrait d’Albert Ayguesparse à priori plutôt poète et à qui on fait (re) dire qu’ « un peu de poésie n’a jamais fait de mal à personne » tandis que, comme peut l’écrire Jean-Baptiste Baronian, « c’est la nostalgie qui forge les passions ».
Belle brochette d’auteurs et autrices dans cet ensemble qui m’a paru davantage orienté « poésie » et sources premières qu’orienté « aphorismes », faisant même la part belle à une romancière comme Jacqueline Harpman confirmant ainsi ce qu’on lui fait dire ; « Que le passé a de la grâce quand l’avenir se rétrécit ! ».
La nostalgie parlera à certains comme moi de retrouver la voix de Jacques Demaude tandis qu’il dit ici, et cela lui va tellement bien : « Il faut sourire aux cimes d’un repos ».
On reconnaîtra, avec quelques autres voix amies, celle d’Isabelle Fable : « Il faut pouvoir ressusciter de son chagrin ».
Les auteurs sont-ils donc destinés à « sculpter la parole et à dompter les chimères » à l’instar de ce que dénonce Albert Giraud il y a plus de cent ans ?
Maud Joiret y va, elle, avec une certaine vivacité quand elle dit : « Je n’aime que ceux qui me trouent ».
L’ensemble oscille ainsi entre voix nouvelles et voix anciennes tandis qu’une plume, parfois inoubliable, comme celle de Mimy Kinet, nous écrit superbement : « Ne fais pas d’ombre avec les mots/ils en contiennent assez ».
Avec Martine Rouhart on peut « s’attarder dans la lenteur » tandis qu’avec Olivier Terwagne on préfèrera les orages au silence : « Je préfère mes orages à ton silence ».
Ecrire en poésie ou en aphorismes…qu’importe pourvu qu’il s’agisse comme avec Anne-Marielle Wilwerth, de « traverser pieds nus la simplicité du moment ».
Pour faire encore plus court, Véronique Bergen nous dit que « l’écriture est image » tandis qu’avec force Isabelle Bielecki nous dit « Garde ta rage pour le papier ». N’a-t-elle pas raison ?

Patrick Devaux