Corinne Poncin, Flux, reflux et mascarets, Merlin, Déjeuners sur l’Herbe, 2021, 66 p. (14€)

Au sein de l’ordinaire quotidien et du merveilleux imaginaire

 

 

 

Les nouvelles de Corinne Poncin sont brèves. En général, trois pages lui suffisent pour cerner un personnage, une situation et terminer sur une chute souvent inattendue, en général nimbée de mystère, toujours féroce. Chacune éclairée par un élégant dessin coloré de Chawa.

En vrac : Un séducteur, davantage préoccupé d’être « explorateur pelliculaire » que de sentiments amoureux, rencontre une Gorgone fascinante. Un soudain veuf d’habitude plutôt effacé profite de son retour au célibat pour assouvir son besoin de propreté. Une esseulée découvre un compagnon idéal complémentaire. Une cérémonie nuptiale censée réunir une famille finira par la déliter. Une réunion d’amis au restaurant un jour de carnaval se confronte à un serveur immigré.

Mais aussi : À la mort de son patron, un subordonné cherche à venger sa vie de servilité ; ailleurs une femme frustrée prépare son suicide sur la tombe de celui qui l’a dédaignée. Un couple de marcheurs se dissocie lors d’une banale promenade et une voyageuse se met à la recherche de son ex habituel compagnon de pérégrinations. Et finalement, un fonctionnaire chargé de l’improbable s’efforce de vivre l’impossible qu’il a lui-même engendré.

Cette énumération laisse percevoir que Corinne Poncin navigue entre de précises observations réalistes de la vie ordinaire et des fables nourries de mythologies, de légendes  où l’imaginaire illustre allégoriquement un fonctionnement sociétal. Ses lecteurs sont amenés à se demander « comment les uns et les autres analysent la même réalité » d’une part, et, d’autre part, jusqu’où ira « sa subtile faculté de rendre possible ce qui ne devrait pas l’être » dans des décors abritant des solitaires, suggérant quelques ouvertures vers les solidaires.

Michel Voiturier (14.06.2021)