Geneviève Bauloye, Feuillage/Filigranes, éd.La Feuille de thé, 2018

J’ai toujours été frappé chez Geneviève Bauloye par l’extrême justesse de ton et de vocabulaire, et la précision des images L’on dirait parfois de ces feuilles que les enfants découpent, pour la fête, à l’imitation du feuillage d’automne.

De temps à autre,une fausse note maîtrisée, et qui nous entraîne d’une rêverie à l’autre. Tantôt c’est le déterminatif, qui fait faux bond à son déterminé, comme à la page 18 de la seconde partie, Passages:  les colonnes de l’horloge/et du songe, le songe vient là comme quelqu’un qui n’était pas invité; p.19: s’absenter dans/Le chant des mémoires, jeu subtil de présence/absence. Page 20, ce sont les photographies qui se souviennent – outil ou bien prétexte qui tient le rôle actif normalement dévolu à l’ouvrier.

De plus, les personnes, qu’il s’agisse de la première, ou d’autres, semblent s’être discrètement éclipsées, leur apparition est plutôt rare, p.33, Le ciel d’automne  couvre/Nos épaules: et c’est le pluriel, qui n’a ici rien de majestatif. C’est l’herbe qui danse, le chêne qui se dévêt pour laisser voir l‘incessant passage, comme un acteur qui change de rôle, à la fin d’un acte, l’esprit du feu qui apparaît. Paysage avec figures absentes? Il y a un peu de cela. Un peu aussi comme une effusion de l’un ou l’autre romantique dans la nature, mais ici tout s’inverse: c’est la nature qui partout s’insinue et s’anime, et le poète n’y participe que par son silence. Mais les végétaux, les pierres, le feu ne semblent vivre qu’en l’attendant, pour un mystérieux concert. Une harmonie secrète se glisse entre les pages: De si loin – Passages – Feuillage/Filligrane, le même dessin grêle et inattendu que les lignes de votre main…

Gouttes de soleil et/ Bleu des ombres/ forêts et nuages/ Le paysage du train se déroule/ Eveillant la nostalgie de / L’image immobile//  Au  balcon du crépuscule/ L’échange des silences/ Les lumières nocturnes/ S’ éteignent doucement.

 

 

Joseph Bodson