Georges Themelin, Les 5 Saisons, contes, éd.bilingue gaumais-français, Ma p’tite édition, rue de Jéhonville, 18, 6890 Ochamps., notre-patois-gaumais@skynet.be.

Tout d’abord, In conte pou la sortie d’hivîr. Un conte qui ressemble furieusement à un conte de Noël…Deux jardiniers qui se jalousent mutuellement, les petits pois de l’un sortent plus vite que les carottes de l’autre, et réciproquement, si je puis dire ainsi. Et puis,…plus rien ne pousse. Grand branle-bas dans Landerneau: on songe à tout, à la pollution, aux sorcières,il vient des curieux de partout pour visiter ce  village bizarre où le printemps ne veut pas se laisser faire, la télévision et la radio même se déplacent, jusqu’au moment où Emile se souvient que l’affaire a commencé quand les « étrangers » sont partis – les étrangers que l’on avait si mal accueillis, y compris leurs enfants. Ils sont partis pour un autre village, où ils ne sont pas mieux traités. Vite, vite, on court les rechercher…et je vous le donne en mille. Le printemps dans les jardins. Un conte qui n’est pas exempt de moraline, mais que Georges Themelin raconte avec tant de bonhomie narquoise, que cela passe bien. Et puis, il y a les dessins de Cécile Liégeois, qui sont tellement dans le ton. Oui, décidément, c’est bien ainsi, dans nos villages. Nous n’avons rien à faire, nous autres, des princes charmants ni des méchantes reines…Ecoutez-le plutôt:

Après ça, tous les djous, i fayint l’ toû, pou surveilli quand ça coummaç’rout  à l’ver. Ah, s’i-s avaint pu poûsser pa dzous pou qu’ça alliche pus vite, i l’araint bin fât! A passant, i rayaint in s’né ou ène pitite parale.

Et, surtout, gn’a-n avout co pont das l’ méche d’à coté.

(Après ça, tous les jours, ils faisaient le tour, pour surveiller quand ça commencerait à lever.  Ah! S’ils avaient pu pousser par-dessous pour que ça aille plus vite, ils l’auraient fait. En passant, ils arrachaient une mauvaise herbe ou une petite patience.

Un matin, Emile a été bien content: ses carottes levaient. Et surtour, il n’y en avait pas encore dans le jardin d’à côté.)

Oui, c’est bien ça, le ton de Georges Themelin, inimitable: une modestie bon enfant, un sourire narquois bien caché dans la barbe, et, au fond, une grande bienveillance pour les gens et les choses. Pour un peu, on le prendrait pour le Bon Dieu, ou au moins, pour un de ses apôtres.

Je ne vais pas bien sûr vous raconter les quatre autres saisons, ce serait vous gâcher le plaisir, que je vous souhaite aussi grand que le mien, car chacune de ces histoires comporte un dénouement soigneusement affûté, une petite morale, comme le refrain attendu d’une chansonnette.pleine d’humour et de plaisir de vivre.

Quant à la cinquième saison..c’est la fin de la chanson..en chanson, justement. Qui a parlé d’une cinquième saison, d’ailleurs? Elle est propre aux vrais Gaumais bien sûr, et ne comptez pas sur moi pour dévoiler l’astuce.

V’là à quèques mots les quate saisons / Mais djè v’oû djà, èt vote question: / « Gn’è ène cinquième qu’è v’avains dit, / Vè nous l’avez bin rabâchi. » (Mais je vous entends déjà, et votre question: / « Il y a une cinquième, aviez-vous dit, / Vous l’avez bien répété ».

Et si Georges Themelin l’a dit, c’est la vérité, foi de Gaumais.

Avec un grand merci à Jean-Luc Geoffroy, qui a rouvert pour nous toutes ces merveilles. Ces contes ont fait partie d’un recueil en deux volumes, A l’ombe d’on vî tillu, parus en 2004 et 2008 aux éditions de la Joyeuserie, à Dampicourt.

Joseph Bodson