Jean-Baptiste Baronian, Maigret, Docteur ès crimes, Les Impressions nouvelles, 2019

Avec Maigret, Docteur ès crimes, Les Impressions nouvelles publient le premier n° de leur nouvelle collection « La fabrique des héros ». L’auteur découpe au scalpel la personnalité et les méthodes du célèbre détective. Ou plutôt l’absence de méthode. En effet le chapitre I s’intitule « Des méthodes qui n’en sont pas ». Dans Les Mémoires de Maigret (1951), Simenon déclare : Connaître le milieu où le crime est commis, le genre de vie, les habitudes, les mœurs, les réactions des gens qui y sont mêlés, victimes, coupables et simples témoins. Tel serait le secret d’une enquête réussie.

Dans Les Scrupules de Maigret (1958), Simenon met en scène une « enquête à l’envers ». C’est l’histoire d’un crime qui n’a pas encore été commis. Maigret s’interroge sur l’état mental des protagonistes, les troubles du comportement et la responsabilité des criminels. Jean-Baptiste Baronian étudie aussi les personnages qui assistent le commissaire : c’est la bande à Maigret, dont les trois chefs de file sont Janvier, Lucas et Lapointe.

Au chapitre III, Dans l’intimité de Maigret, l’auteur pousse plus loin son analyse de la personnalité de Maigret, en se plongeant tout d’abord dans son enfance. Voir Le Témoignage de l’enfant de chœur (1947). Et puis il y a l’humeur de Maigret, tantôt emmerdeur, tantôt emmerdé, comme le dit Baronian. Au fur et à mesure que l’on progresse dans l’étude psychologique de Maigret, le narrateur en parle comme s’il échappait à l’auteur. Et pourtant c’est bien Simenon qui l’a créé.

Baronian consacre aussi un chapitre à la perception que Maigret a des femmes ; il en vient ainsi à dégager un aspect essentiel de l’œuvre de Simenon, à savoir sa fameuse méthode qui n’est ni déductive, ni inductive, ni intuitive. (…) Sa méthode est celle du romancier. Simenon fait exister des êtres prodigieusement concrets (page 74). Ainsi en est-il du personnage assez énigmatique de Mme Maigret.

Les trois derniers chapitres sont consacrés à Maigret piéton, Maigret et la retraite, Maigret et la boisson. Enfin l’essai se termine par une revue commentée des adaptations cinématographiques des enquêtes de Maigret. L’ultime interrogation de Baronian est : La vie de Maigret est-elle un échec ? Est-il si différent des autres personnages de l’immense fresque simenonienne ? En bref cet essai ouvre la porte à une approche renouvelée de l’œuvre de Georges Simenon.

Jacques Goyens