Josée Viellevoye, Sur les sentiers..., poèmes, éd. Les impliqués.

Josée Viellevoye, qui est venue assez tard à l’écriture, est déjà l’auteure de quatre romans et d’un recueil de nouvelles. Ceci constitue son premier recueil de poèmes.

Une chose frappe d’emblée, c’est son allant, son enthousiasme même, qu’il s’agisse de célébrer ses victoires, la beauté du monde, ou bien aussi les épreuves qui jalonnent notre vie à tous. Et c’est là; je crois, dans la qualité de cet enthousiasme, que réside la qualité essentielle de ce recueil. Cependant, la poésie demande aussi une certaine lenteur, une mûre réflexion, et aussi, disons-le, une certaine concision. Les longs poèmes, tels qu’il s’en écrivait à l’époque romantique, débordants d’idées, de descriptions, n’atteignent plus guère le public pressé d’aujourd’hui.

D’autre part, il faut prendre comme règle, me semble-t-il – car la poésie aussi a besoin de règles – que ce qui peut se dire en prose (discussions morales ou philosophiques, p.ex.), n’est pas l’affaire de la poésie, qui a besoin d’un certain secret, d’un certain mystère. En voici un exemple, dans son recueil,  p.88, dans La roue tourne:, « La solitude n’existe pas, / c’est ce qu’ils me disent,/ c’est ce qu’ils veulent / (ne nous leurrons pas)./. Plus rien à dire, / plus rien à vouloir, / suivre la route, /pas d’accord ! La solitude me nourrit,  / c’est elle qui me console, / c’est avec elle que je convole. Bien sûr, on peut partager cet avis, mais une telle diatribe n’a pas sa place en un poème: c’est seulement dans le silence qui précède le poème qu’elle aurait sa place…mais c’est le silence; justement, qui doit préluder à la solitude.

Je lui conseillerais volontiers de débuter par des poèmes plus courts, des haï-kus, par exemple, et de s’appliquer à concentrer, filtrer ses sensations (plutôt que ces discussions), pour en offrir au lecteur la quintessence. C’est à cela que doit s’employer son énergie, son enthousiasme…et parfois, d’ailleurs, elle y arrive d’elle-même, comme dans La garçonne  p..42, où la répétition du terme a, à elle seule, une force de conviction bien plus grande qu »une longue diatribe.

C’est cela que nous attendons d’elle, et je suis persuadé qu’elle peut le faire.

Joseph Bodson