La statue du Commandeur Manuel Verlange roman éditions academia (241 pages, 21 euros, 2024)

Bart et Boris vivent aux antipodes l’un de l’autre tandis que Nora, la femme de Boris, leur sert de lien familial entre beaux- cousins.
Bart, à l’aise dans ses costumes et tailleur de surcroît, aide régulièrement financièrement Boris qui, après avoir été marchand ambulant d’encyclopédies, tente une carrière d’écrivain.
Entre rationnel et propension à dépenser exagérément, l’auteur fait allusion à la fable « La Cigale et la Fourmi » pour situer son intrigue. Bart devient- il davantage dépensier – et inquiet – quand il achète une moto ? : « Le vendeur avait soupiré : – Appelez ça comme vous voulez, vous la prenez ou pas ? Bart était à deux doigts de s’enfuir de la concession, cet achat représentant une atteinte grave à son rationnel ».
Avec l’auteur on reconnait l’efficace genre du biographe prompt à saisir un moment, à le rendre crédible. Son humour et le mot bien placé font le reste, la Statue du Commandeur servant de prétexte, d’une certaine façon, à enfourcher la monture de la vie.
Indirectement l’auteur met en évidence le monde de l’écriture et de l’édition.
La vie de Boris va-t-elle basculer tandis qu’il a rendez-vous avec un éditeur inespéré ?
Dans ce roman où tout est millimétré à l’humour près, parfois empreint de fines gastronomies, tout un monde très petit bourgeois rappelle , à sa façon, la « Comédie Humaine » de Balzac, notamment « Etudes de mœurs » tandis que des préoccupations humaines peuvent également, être relatées, telle cette circonstance évoquant l’adoption : « Je t’aime sans généalogie, je peux t’inventer comme je veux. Elle l’avait embrassé avant de murmurer : – Ton trou noir te permet d’écrire, tu devrais le remercier ».
L’argent et les dettes vont-ils pourrir les relations entre les deux couples ?
Bien sûr l’auteur n’a rien à voir avec Boris, son personnage, quand il dit : « Je n’existe pas en dehors des livres. Sans eux je ne suis que du désordre, une forme de courant d’air incohérent » tandis que, parallèlement aux faits, et en filigrane, apparaît cependant la difficulté de vivre, financièrement, une vie d’écrivain..
Le couple qui calcule sa vie au centime près va-t-il survivre au nom respect de la créance permanente – et excessivement ressentie – du cousin tandis que Bart est pourtant très à l’aise dans ses costumes ?
Excellents pour les muscles zygomatiques, les dialogues sont théâtralisés et menés de main de maître à la hauteur de l’auteur également scénariste.

Patrick Devaux