Laurence Amaury, Ces dames de cape et de plume, nouvelles, L’Amant Vert éditions.

Une écriture à la fois très moderne et très classique, sans fioritures. L’auteure n’hésite pas à aborder de front les grands problèmes de notre société.

On sent, d’autre part, toute l’importance qu’elle accorde à la littérature. Elle se réfère à plusieurs reprises à la citation de Proust: La vraie vie, c’est la littérature!, et pour plusieurs de ses personnages, déçus par la vie, la littérature constitue un lieu de refuge. Mais la musique, elle aussi, compte parmi les occupations majeures: chaque nouvelle se réfère à une chanson, une œuvre musicale qui lui sert d’entrée en matière. La lecture, l’écriture, prennent la noblesse, la solennité d’une cérémonie quasi religieuse. Ses héroïnes, ses modèles, plutôt? Emily Dickinson, Jane Austen, Emily Bronte. On ne peut mieux choisir.

Une autre citation? Elle est, celle-là, de George Sand. Apprenons à être révolutionnaires, obstinés et patients, jamais terroristes. Ajoutons-leur Marie Bashkirsteff, Marcel Moreau, Anaïs Nin, et nous déboucherons sur la phrase de Marguerite Duras: Ce malheur merveilleux: écrire.

Un grand bonheur d’expression, un vrai festival d’allitérations, parfois, qui côtoie le virelangue, comme à la page 130. Elle s’attardera tout spécialement sur Marie Bashkirtseff, qui entretint une correspondance avec Maupassant sous le couvert de l’anonymat, peu de temps avant de mourir, ce qui fera dire à Raoul Mille: Son journal est un confessionnal où elle est à la fois le prêtre et le pécheur. Anaïs Nin, Julie de Lespinasse: on n’est pas loin des pièces de Marivaux, mais ici aussi la fin est tragique, l’amour se conjugue avec la mort.

D’autres éclairages, d’autres perspectives dans L’anorexique et le boulanger, une grande attention à « l’être » de la femme, aussi bien à l’apparence extérieure qu’à la psychologie. Un climat d’angoisse et d’insécurité. La petite cuillère et autres désastres, le rôle des objets inanimés dans notre vie. Le quai des quatre lambins, illustrant, s’il le fallait encore, l’amour de Laurence Amaury pour sa bonne ville de Mons, ses petites ruelles, tout le folklore prêt à jaillir des pavés, omniprésent. Et  Le temenos, une nouvelle qui est un message d’espoir…

Un recueil très varié, aux sources d’inspiration multiples, mais des nouvelles qui s’adressent en chacun de nous à ce qu’il a de meilleur, de plus éveillé et de plus accueillant.

Joseph Bodson