Lili Sorel, Dans mon pays, loin de mon paysLe métissage en héritage

Editions Couleur livres / Collection Je   –  www.couleurlivres.be, 130 pages

 

La collection je, dirigée par Daniel Simon, rassemble des récits de vie et des témoignages. Le livre de Lili Sorel s’inscrit totalement dans cette optique en relatant une partie de notre histoire relationnelle avec le Congo belge et tout les faits et vies qui ne cessent d’en découler. L’auteur explique, dans l’avant-dernier chapitre intitulé « Ecrire ? », comment elle est parvenue à l’ultime étape, la publication, de ce qu’elle venait d’écrire : sa vie, ses douleurs, ses souffrances, tout ce qu’on a toujours tenté de lui cacher. « Je décide d’écrire un livre qui raconterait les aventures, les souhaits, les blessures et le combat de deux enfants métis, une sœur et son petit frère, privés de leur mère et d’un de leur pays, riant malgré tout. »

 

Le récit :

Le père de Lili rentre en Belgique, son pays, avec ses deux enfants, Lili et Pierre, âgés respectivement de quatre et un an et demi. Retour sans la mère des enfants.

Ils vivront avec une belle-mère qu’ils n’aiment pas mais surtout, il leur faudra de très nombreuses années pour comprendre qu’ils ne reverront peut-être plus leur mère. Ils apprendront bien plus tard qu’elle est décédée et donc tous les espoirs s’envolent d’un coup. Les deux enfants seront soudés dans toutes les difficultés qu’ils rencontreront (école, quotidien etc.). Et si Lili a ce côté protecteur pour son petit frère, elle ne remplacera pas non plus sa mère pour lui. Elle ne cessera de lutter. 

A la page 107, donc quasi à la fin du récit (ce qui démontre que le processus fut lent, très lent mais la cause jamais totalement désespérée), elle écrit : « Je peux désormais situer sur carte le village d’origine de ma famille maternelle et c’est une réelle fierté. Ne pas savoir d’où je venais étais une souffrance quotidienne, je n’étais reliées à aucun endroit, communauté ou langue. »

Le récit relate les faits de manière très simple laissant ainsi apparaître la souffrance aiguë qui habite Lili et son frère, les différences, le métissage et ce pays, cette mère congolaise dont on ne veut parler. Qui mieux que le titre pourrait dès lors résumer ce qui taraude le corps et l’esprit de ces jeunes métis vivant en Belgique : « Dans mon pays, loin de mon pays » de même que le sous-titre « Le métissage en héritage » ? Des êtres toujours à la recherche de leurs racines et qui ne pourront « comprendre et vivre leur vie pleinement » qu’après avoir obtenir quelques éclaircissements à ce sujet.

« Je veux agir seule, c’est mon combat. Je veux « reprendre ma vie », me la « rapproprier », je ne veux plus d’une « demi vie » comme je l’ai lu dans le livre de G.N. Fisher. Il est temps de sortir de l’ornière de mon chemin et de donner consistance à mes désirs et souhaits. »

Un récit émouvant à lire pour toujours mieux comprendre ce que vivent des êtres partagés entre deux pays, cultures, couleurs, lieux, etc. Ce que nous croyons en savoir est bien loin de la réalité.

Danielle Gerard