MARTINE ROUHART GUETTER LES EMBELLIES, , Editions Le Coudrier, Préface de Patrick Devaux, Illustrations d’Isabelle Simon, 2024, 62 pages, 18 euros.
Retour à la poésie pure, sans fioritures ni majuscules. L’écriture de l’auteure se dépose doucement sur la page comme les feuilles de l’octobre sur une allée et vont attendre, le temps d’un silencieux sommeil, le frisson léger de la renaissance. C’est aussi simple et beau que cela : une poésie qui épouse le cycle de la nature, le mystère d’un jardin, l’impression profonde qu’un paysage entrevu laisse dans l’esprit. Martine Rouhart parle à l’oreille de (son) univers, elle se fond dans les bleus et les ombres d’un tableau vivant, elle est attentive au moindre bruissement, froissement, souffle, cri, chant, signe pour en connaître le sens et l’usage. Elle ferait bien corps avec chaque arbre, les embrassant pour mieux en percevoir la voix secrète de la sève et le fin travail de l’écorce. Une passion, un élan, une ivresse parfois à se donner tout entière à la Nature, jusqu’ à perdre pied à l’intérieur d’elle-même. Mais rien d’excessif toutefois dans une telle poésie, d’une délicatesse et d’une sobriété constantes. Les mots sont légers comme des nuages, les images sont des pétales échappés d’un rêve, les pas sont aériens et les heures se replient doucement dans le nid de la nuit. On croirait suivre une sylphide ou voir se fondre dans la végétation une sœur de Daphné. Mais point de mythe ou de magie dans cette vision des choses, rien que du vivant et du réel saisis avec un sens aigu de l’observation et un désir profond de l’attente et de la découverte. Comme les oiseaux / je crois aux promesses / inventées par le matin…Ce qui est écrit, ce qui est devenu poésie existe sous nos yeux captivés et y habite une fée quotidienne nous soufflant à son rythme mesuré des petites phrases qui sont autant de vrais bonheurs si l’on veut bien y prêter une attention plus que complice. Créative elle aussi, par une sorte d’échange subtil.
rien
de ce qui nous touche
n’est insignifiant
aucun chant
n’est jamais
perdu
La cage du temps est toujours ouverte. Suivons l’oiseau qui nous guidera d’un vers à l’autre. Le voyage est accessible à tous, à tout âge, à toute saison, à chaque page de ce bréviaire de l’air et de l’art de vivre au bout du bout / d’une pensée nouvelle…
Michel Ducobu