carré d'orMichel Joiret, Le Carré d’or, Bruxelles, M.E.O., 2015, 160 p.

Le roman de Michel Joiret apparait comme le portrait d’un avocat, tracé au moment où sévit sur notre planète une apocalypse écologique dans une atmosphère millénariste. Celui-ci « imagine le croisement du passé avec le présent, la combinaison grasse des archives et le nécessaire délitement de son existence ».

L’homme, « ontologiquement seul », est un veuf qui ne s’est jamais remis de la mort de celle qu’il aimait. Entre un métier auquel – avec son « carnaval des audiences » – il croit de moins en moins, des enfants éloignés, une gouvernante attentionnée, de très épisodiques rencontres avec une jeune amante, il y a surtout beaucoup de place pour du whisky.

Le héros ne cesse d’effectuer des navettes du présent au passé. Il accumule les phrases interrogatives à propos de lui, du monde, des fantômes qui l’entourent. Ses fantasmes croissent : « Trop saoul, trop seul, il use du virtuel pour exister ». Il traduit une part de son désarroi à travers de caustiques remarques au sujet des dérives des valeurs du monde actuel.

Mais cette histoire est aussi le prétexte pour un citadin de parler de la ville qu’il aime : Bruxelles. Et ceci dans un style qui, parfois, « a conservé le goût des pompes et des fioritures ». C’est d’ailleurs à cette exploration qu’est redevable le titre du livre. En effet, « Le Carré d’Or » est une portion du territoire de la capitale de l’Europe, situé entre les portes de Namur et Louise, la place Poelaert et les palais d’Egmont et de Justice.

L’auteur-narrateur alors se laisse aller, prolixe, à des descriptions, des anecdotes, des souvenirs, des digressions historiques. Son personnage continue à se demander quelles sont « les intentions secrètes de la destinée », lui qui se sent de plus en plus proche de la mort et se dit que c’est sans doute le moment de profiter de la vie une dernière fois. Surtout si elle a partiellement été vide.

Tout cela se teinte de nostalgie et d’une pessimiste lucidité. Qui peut vraiment être satisfait de son existence ? Assurément une minorité, une infime minorité.

Michel Voiturier