Monique Thomassettie, Un jeu de piste multiple Au carrefour des temps (ed Monéveil, 2024, 75 pages, 12 euros)
Ce livre ( illustré par deux belles huiles de l’autrice), clôt une trilogie dont Monique Thomassettie dit elle- même qu’il s’agit de « Trois autobiographies partielles. Si elles se recoupent et se complètent, elles demeurent fragmentaires. »
Les textes, qui remontent loin en arrière dans sa vie, disent en mots courageux et sincères venus du tréfonds d’elle-même, la ligne brisée de la vie. Les blessures, « les choses refoulées. Refoulées à défaut d’avoir été résolues », les souvenirs des rêves éveillés.
Les saisons, les bois, semblent faire partie intégrante de l’autrice, comme les forêts de ses réflexions et questionnements incessants. Sur la mort en particulier, elle s’interroge : « existentiel enfer où l’on abandonne ses espérances? ».
Une foule de questions « qui se ramassent à la pelle. Pour un humus d’où jaillira la réponse verte d’un bourgeon ». Monique Thomassettie se voit « feuille », mais « ni plus ni moins vaine que les autres, cette feuille était la mienne! Particulier, son envol. Particulière sa chute ».
Elle s’est véritablement créé un monde à elle, où l’Art, la création sous toutes ses formes, tiennent une grande place, et qui lui est sans doute aussi refuge.

Le recueil semble à première vue un peu déconstruit, composé d’une succession de poèmes, de textes poétiques, de réflexions, de réminiscences, un mélange où l’on aurait parfois peur de se perdre. Mais l’on sent que ce qui relie le tout, ce qui relie « les diverses palpitations de sa (ma) vie », assurément c’est le souffle, un souffle qui « se lève. S’envole et revient ». C’est ce souffle qui porte son inspiration poétique, et porte Monique Thomassettie toute entière.
« Je ne mourrai pas de ne pas exister », dit-elle. Elle est comme le vent, « le vent, n’est-ce pas l’esprit qui souffle comme il peut. Errance de nos vies, au fil insaisissable ».
Son écriture a un charme envoutant, essaimée de fulgurances, de métaphores, de rapprochements réussis et parfois inattendus. « Le Temps passe, signifie bien entendu : je passe ! »
L’autrice se livre ainsi à nous dans un subtil jeu de mémoire, un véritable jeu de piste (« éveillé », ou « endormi ») à travers sa vie, par de nombreux retours en arrière ; un travail éprouvant qui, comme elle le déclare à la fin du recueil, ne cherche pas à savoir ni où l’on est, ni « vers où l’on va », mais « de comprendre un peu mieux d’où l’on vient ».

Martine Rouhart