Nelly Laurent, La rue des Songes ou les rêves d’une métamorphose, L’Harmattan, coll. Encres de vie, 2014, 94 pp.,12€.
Elle est belle votre histoire
Elle est apaisante
Toute blanche et brûlante
Par-dessous le blanc
Comme un brin de neige
écrit Christian Bobin, dans un poème adressé à l’auteure.
Il s’agit en fait de la reprise d’un livre, Flocons d’enfance, paru en 1998, aux éditions Eole, dans lequel Nelly Laurent racontait une histoire vraie, l’histoire d’un amour entre deux enfants qui habitent le même village, et la même rue. Cette histoire s’est poursuivie, elle dure d’ailleurs toujours, toujours aussi fraîche et attachante. Une histoire ravissante sans mièvrerie, qui a gardé tout son charme, et s’est enrichie de l’expérience de nombreuses années, ce qui fait le sujet de ce nouveau livre, dans le prolongement du premier.. Une grande simplicité, un réel don d’enfance. Un livre tout tissé de grâce enfantine, la démarche d’un équilibriste qui a tendu des cordes de clocher en clocher, et qui danse.
Je ne résiste pas au plaisir de vous en faire lire, en rappel, un extrait de Flocons d’enfance, à la page 66, à propos d’une partie de cartes:
Nous jouons à bataille. Un pli formé de nos deux mains, une paire de cartes rouges, glisse en secret tout au fond de ma mémoire. Une dame de carreau et une dame de cœur.
Je fais un vœu à Marie. Dans la chapelle de Clairefontaine, aux portes de la ville, elle s’appelle Notre-Dame du Bel Amour.
Elle m’écoute toujours d’un bon sourire lorsque je lui parle tout bas. Ce samedi soir elle m’exauce déjà…
Dans mon doux peignoir vert, je fonds de bonheur tout au fond de mon cœur.
Entre-temps, bien sûr, du temps a passé, les gens, les lieux ont changé, mais le lien reste fort et serré entre les rêves d’autrefois et les belles réalisations d’aujourd’hui. C’est tout le sujet de La Rue des Songes, où nous lisons, p. 27:
Telle une équilibriste, j’ai ouvert le temps et l’espace, du bout des doigts de pied; en souplesse, sans regarder en bas. Apprentissage de la légèreté. De l’extrême légèreté de la confiance placée en contrepoids du calendrier feuilleté à l’envers. Pour trouver sans impatience son point d’appui intérieur. Un point solide, pas plus gros qu’un caillou. Il deviendra la pierre d’angle de toute une voûte.
On ne peut s’empêcher de songer ici à la phrase de Rimbaud: J’ai tendu une corde de clocher en clocher; et je danse…
A ne pas manquer.
Joseph Bodson