Nicole Marlière,  Les Etés de Jeanne, M.E.O., 2021.

 

Les étés d’une collégienne bruxelloise, qui va grandir au hasard des rencontres, des flirts, des passions et des désillusions, entre une chanson de Petula Clarck, La Nuit n’en finit plus, et une autre de Jacques Brel, La Valse à mille temps, entre les années 62-66, les légendaires et tant regrettées « golden sixties ». Une époque charnière qui filait pleins tubes vers son mai 68, renchérit la romancière au terme de son récit. De saisons trépidantes en fins de mois exsangues, Jeanne vivra l’endroit et l’envers de l’amour, de la liberté, de l’inconscience et de la responsabilité car rien n’est facile ni sans périls quand, à seize ans, on prend tous les risques pourvu qu’on échappe au carcan des conventions, à l’ennui de vivre à l’ombre étroite des siens. Nous la suivons tout au long d’un parcours chahuté, au son des discothèques de la Côte belge, des ambiances de bistrots bruxellois ou parisiens, dans les beaux quartiers du sud de la capitale ou dans les chambres blafardes des nuits d’hôtel, toujours impatiente, aventureuse, téméraire et prête à affronter le pire, le rejet ou les pièges pervers de la séduction. Elle apprendra vite et fort son métier de vivre, loin de ses parents démissionnaires, de l’épais confort scolaire, et elle assumera, plus tôt que prévu et avec une volonté étonnante, l’épreuve de la vie à deux sans argent, sans soutien, sans avenir. Mais c’est sans connaître les ressources que va lui trouver la romancière, tout à fait en phase avec son sujet, son personnage, à l’écoute de ses désirs les plus profonds.  Un roman très vivant, écrit à belle allure, qui joue allègrement avec les limites, les lourdes balises d’une époque que la jeunesse ne rêvait que de transgresser, les yeux grands ouverts sur un nouveau monde, une nouvelle vague de vie, à inventer et à assumer pleinement, sans autre modèle que le meilleur de soi.                                                          

Michel Ducobu