Olivier Odaert, Solitudes, nouvelles, Académia, 117 pages, 15 euros- Illustrations de Sylvain Delcourt

Une jolie surprise que ce recueil, premier recueil de nouvelles d’Olivier Odaert, professeur de littérature et de philosophie à Tournai.
Vingt-quatre nouvelles et récits, denses, souvent très courts (ne dépassant pas deux ou trois pages), très variés au niveau des personnages ou du contexte, et qui suivent le chemin des saisons, de l’équinoxe d’automne au solstice d’été. L’on sait que la vie est une succession de ruptures et de séparations, une ligne brisée faite de hauts et de bas, et toutes ces nouvelles nous racontent ainsi des histoires -plus ou moins ordinaires, et plus ou moins tristes- de solitude.

Il y est beaucoup question de l’enfance, de mélancolie et aussi, de poésie. La tristesse est souvent présente mais toujours adoucie par la tendresse, une tendresse pour le genre humain en général, qui doit se débattre dans les misères de la vie au quotidien.

« Trouver la mort » est un texte particulièrement émouvant faisant penser par son thème au roman japonais de Shichirō Fukazawa (et au film), « La ballade de Naramaya », où de très vieilles personnes, devenues à leurs propres yeux un fardeau pour les autres, s’en vont mourir au sommet d’une montagne enneigée.

« La Pocharde » met en scène l’un de ces nombreux accidentés de la vie que notre monde pressé met de côté, ces laissés-pour compte qui pourraient disparaître un beau matin ou n’importe quelle nuit, telle une fumée, sans laisser d’autre empreinte qu’un vague souvenir imprécis, sans laisser vraiment de vide, sortes de passagers clandestins ballotés d’un bord à l’autre de l’existence. Des personnes qui, bien entendu ne se résument pas à ce qu’elles sont devenues et ont, autrefois, caressé des rêves, comme tout le monde…

Mais il ne faudrait pas croire que tous les textes sont si tragiques. « Le Sauvageon » est une vraie nouvelle policière, avec une fin complètement inattendue. Ailleurs, il est question du cadavre d’une grenouille, du rêve d’une vieille dame, ou encore de la souffrance de la mère de voir son enfant quitter le cocon familial,…

Dans « Le Sentier Perdu », plane la douce nostalgie de l’enfance. »Il marche seul ce jour-là. Les mains dans les poches et le regard bas. Il ne courra plus les sous-bois. Son temps est passé. Le chemin est boueux et les herbes sont grises maintenant. Il n’évite plus les flaques d’eau depuis longtemps.(…)Il a grandi et pourtant le chemin lui paraît plus long qu’autrefois. Il se dit, quand mon père avait mon âge, il avait déjà quatre enfants, et je le prenais pour un vieil homme, lui qui n’avait pas trente ans. » (« Le Sentier Perdu)

« Ce matin elle entre, comme tous les autres matins, dans la cuisine, à moitié endormie encore, elle allume les lampes, (…), sort les assiettes, chaque chose est à sa place pour le rituel du jour naissant, et elle esquisse ce sourire de contentement qu’elle a dans les infimes ravissements du quotidien, et puis elle se souvient,(…) et elle s’assied toute seule (…) (« Une Séparation »)

Martine ROUHART