Philippe Remy-Wilkin Onze Bruxelles La capitale belge dans la tourmente de novembre 1918 , éditions Samsa (2023, 105 pages, 18 euros)
La petite histoire mêlée à la Grande amène Valentin à Bruxelles en novembre 1918 quand le 9 novembre le Chancelier du Reich Max de Bade annonce l’abdication de Guillaume II, l’empereur d’Allemagne tandis que Bruxelles est bousculée par les évènements ; « La population bruxelloise ne comprend pas, mais pressent. Tout bascule. Des soldats jettent leurs cocardes aux couleurs allemandes en direction des badauds qui exultent « Vive la Belgique ! Vive la France ! La Grand Place est atteinte. Un symbole. Le trésor architectural a résisté à quatre années d’Occupation et offre à la foule compacte l’image d’une Belgique éternelle ». La République est proclamée ! Après l’enfer des tranchées, Valentin est ébahi.
Dans ce roman qui pourrait être un récit ou une chronique historique Philippe Remy-Wilkin se sert d’un style proche du journalisme historique, celui-ci étant entrecoupé de dialogues brefs motivant l’action. Valentin Dullac, traducteur et émissaire du Roi se trouvera en pleine révolte populaire et syndicale. Le changement de décor, voire d’époque est brutal : « les journaux qui ont collaboré doivent à présent louer les mérites du Roi Albert, de l’armée belge, du courage patriotique. Et, à l’inverse, il faudra condamner les activistes flamingants… ». Avec Valentin s’affichant contre la lutte des classes, on comprend les enjeux de l’époque : « Je n’appartiens pas à votre camp, Volckaert, ni à celui de Freund et Einstein. Je ne veux pas d’une république socialiste belge. Du moins selon les normes soviétiques ».
On comprend bien l’intrigue. Il s’agit de « libérer une ville libérée » avec le Roi Albert qui, au plus vite, doit marcher vers la capitale.
Onze Bruxelles. Notre Brussel va-t-elle vaciller ou deviendra-t-elle le moteur de l’équilibre tandis que, déjà alors, les tensions linguistiques divisent la nation ? Les Bruxellois vont ramener leurs héros d’Allemagne : Adolphe Max a passé 4 longues années en déportation. Camille Lemonnier deux.
Le chiffre onze s’avèrera doublement important : après 11 jours depuis le 11 novembre, entre explosions avec de nombreuses victimes et autres pillages, avec le retour d’Albert, Roi des Belges, s’active une traditionnelle et ancestrale « Joyeuse Entrée » : « Toutes les composantes d’une société feignent- elles pour un temps l’amour universel, l’égalité et la foi en l’avenir ? »
Qui sait ? « Les amères leçons du passé doivent être réapprises sans cesse » Cette dernière citation, pas dans le roman, est d’Albert Einstein mais correspond bien, je crois, à la finalité historique des évènements relatés et mis en scène par Philippe dans ce roman intelligent et presque didactique.
Patrick Devaux