Patrick Devaux, Statues ombellifères, illustrations C Berael, 48 pages, Le Coudrier, 2024

Pour le poète, chaque chose a son mystère , chaque chose a une voix, qu’il entend et écoute attentivement.
Comme ces blanches statues ,  la « Vénus comblée d’un insaisissable manque »,  ou les « bustes aveugles ».

Ici le poète s’adresse à elles, rentrant dans l’intimité de leur ombre, complice de leur silence apparent, s’en rapprochant assez pour les tutoyer.
Parfois elles ne sont qu’intercesseur pour lui permettre de s’interroger en son for intérieur (« On reconnait les statues à ce qu’elles ne disent pas/on est toujours le muet de quelqu’un »), ou pour convoquer les absents, les mettre « dans tous les regards possibles/dans toutes les ailes imaginables ».

Les statues vivent et donc, elles peuvent aussi mourir, « devenues pâles » de la terreur occasionnée par les hommes , « écroulées entre deux guerres » ; et parfois, elles sont « ramenées à la vie à fleur de terre » d’un coup de pinceau, ou …par le trait d’encre d’un poète.

Le temps qui passe est un thème prégnant dans ce recueil. Le poète puise-t-il un peu de sa propre force et de sa volonté dans « l’instinct de survie des cathédrales », à contempler ceux qui « s’aimèrent avec des mains de plâtre » et elle, qui « en resta bouche bée dans son éternité » ?

Patrick Devaux réussit cette prouesse de donner vie aux statues, de prêter des sentiments et donner la parole à ces pierres de marbre « muettes jusqu’à parfois enfouir lentement leur tête dans le sable » pour dialoguer avec elles.
Mais on le sait, lorsqu’on parle aux choses c’est toujours nous qui nous parlons à nous- mêmes, nous posant ces questions essentielles qui n’attendent pas nécessairement de réponse…
Il faut remarquer aussi les très beaux dessins empreints de mélancolie de Catherine Berael.

Martine Rouhart