Patrizio Fiorelli, La mort des Gaules  de Patrizio Fiorelli, éd. L’Harmattan, 2019

L’auteur, Patrizio Fiorelli, ancien journaliste de la BBC, fut correspondant de radio, de journal et de télévision. Son premier roman « La mort des Gaules » réinvente avec talent, passion et précision l’histoire de France telle que nous la connaissons par « La guerre des Gaules » relatée par César.

D’abord, jusqu’à présent, on ne savait rien du vrai déroulement de cette guerre ni de son vrai héros. Mais, la découverte en Irlande du squelette d’un jeune guerrier tenant en mains un étui rempli de papyrus bien conservés, datés de l’époque, bouleverse ce que nous croyions connaître. Ce récit, outre sa valeur littéraire, livre une observation fine sur la guerre au quotidien, la psychologie des combattants, la manière d’accéder au pouvoir, la cruauté des belligérants, les trahisons…Il ne cesse de nous poser la question de notre humanité.

Nous sommes en 54 avant J-C. César progresse vers le nord et l’ouest pour conquérir la Gaule libre composée de tribus disparates, parmi lesquelles celle des Termes, dont le chef Artévos nourrit la volonté farouche de fédérer ces composantes pour en faire une Gaule libre et unie. C’est un homme intègre, cultivé, intelligent et courageux., au contraire des autres chefs de tribus. Il attend le moment propice pour attaquer César. Mais le soulèvement ne peut être ordonné que par le Rix (roi) qu’il s’agit d’élire. C’est ici que la politique s’en mêle, comme toujours, en ayant recours à tous moyens pour détenir le pouvoir…

Trois castes se disputent la suprématie sur le peule : le clergé (les druides), les chefs de tribus et les militaires Les druides profitent de la crédulité du peuple pour s’adjuger le droit d’élire le Rix. Ici aussi, on pense à nombre de pays où, de nos jours, la religion l’emporte sur la démocratie. Or, il se fait qu’apparaît ici un personnage dont on peut s’étonner que le nom n’ait pas encore été cité : Vercingétorix. C’est un homme jeune, grand, musclé, fils du chef des Arvennes, la plus grande tribu gauloise. Ses qualités physiques ne sont relayées par aucune autre, ce dont se réjouissent les druides qui prennent emprise facilement sur lui et le nomment Rix en lui donnant des pouvoirs militaires pour lesquelles il n’a aucune prédisposition. Il ne connaît qu’une stratégie ; attaquer, attaquer ! C’est le Trump de l’époque.

Nous en revenons ici au papyrus du jeune squelette découvert en Irlande. Quand le Rix décide d’attaquer, ce jeune homme, fils d’Artévos, ce chef de grande valeur qui souhaitait d’abord fédérer les tribus et d’attendre le bon moment pour attaquer César, reçoit l’ordre de son père de le suivre partout, d’écrire tout ce qu’il voit et entend et c’est ainsi que nous détenons le récit de la vraie guerre des Gaules et la cause de leur mort. Il se fait qu’à chaque fois que le Rix lance une attaque sans discernement, c’est Artévos qui ramasse les pots cassés (c’est le cas de le dire pour l’époque !) et trouve une nouvelle tactique pour recoller les morceaux…

Avant d’en arriver à la défaite finale, il faut mentionner deux passages que l’on pourrait qualifier de « rencontres au sommet ». Au moment du soulèvement ordonné par le Rix, César fait appeler Arténos pour lui proposer un plan de paix : il le fera nommer roi des Gaules tandis que lui ramènerait ses troupes en Provence, preuve qu’il aurait pacifié la Gaule. Il pourrait alors rentrer à Rome car il doit contrer Pompée devant les sénateurs. Les dialogues entre ces deux hommes d’exception sont comme des morceaux de bravoure. Ils se parlent ouvertement : sur le pouvoir, la manière d’éviter la guerre, de la mener, des stratégies militaires, de leurs intentions (tout en gardant secrètes les actions qu’ils préparent l’un contre l’autre…). Les deux rencontres se solderont par un refus d’Arténos d’être roi des Gaules : César a fait couler trop de sang. Les deux hommes se serrent longuement la main en se quittant. Comme à la TV !

Malgré la victoire de Gergovie due encore à un nouveau plan d’Arténos, le Rix, en attente du renfort qui n’arrivera jamais (César l’avait intercepté), finira par signer la mort des Gaules à Alésia. Avant cette défaite finale, un vieux druide aveugle et agnostique (double symbole !) propose une ultime solution : César doit absolument ramener le Rix vivant pour son triomphe à Rome. Il suffit que le Rix s’enfuie. Tous les Gaulois sont prêts à donner leur vie pour ouvrir une brèche d’un côté et y attirer les Romains pour que le Rix s’enfuie de l’autre. Tous s’élancent sachant qu’ils vont mourir. Le jeune fils, narrateur de ce récit, y est blessé et reste huit jours entre la vie et la mort.

Quand il retrouve ses esprits, c’est pour apprendre que son père Arténos est mort et que le Rix s’est rendu. Prisonnier, le jeune homme défile devant César qui lui dit : « Je n’ai jamais voulu la mort de ton père, au contraire. Prends ces chevaux avec les gens de ton village, vous avez de la nourriture. Rentre chez toi » Ce qu’il fait mais là-bas, tous sont morts : sa femme, son enfant, son frère. Perdu, il rencontre un ami de son père qui lui dit d’embarquer vers l’Angleterre. Son corps sera retrouvé en Irlande, avec le papyrus porteur du récit minutieux de la mort des Gaules. En Irlande ? Un mutant, sans doute…

Dominique Dumont

 

 

 

Dominique Dumont

 

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