Paul Mathieu, Auteurs autour, éd.Traversées

Prix de la presse poétique, en 2012, à Paris, la Revue Traversées dirigée par Patrice Breno, à Virton, (l’ancien fief de Georges Bouillon), innove en étendant ses activités à l’édition.  C’est à cette enseigne qu’a paru un important recueil de textes analytiques par Paul Mathieu qui est bien connu dans notre monde des lettres.  Dans un style clair entrelacé de pertinentes évocations culturelles se témoignant de sa haute exigence d’humaniste, l’auteur nous fait récit de ses lectures de rencontres « pour quelques voix contemporaines et au-delà».  Certains de ses textes sont accompagnés d’un impressionnant déploiement de références où l’on rencontre les noms, notamment, de nos amis Jean-Baptiste Baronian, Eric Brogniet, André Doms…  Une vingtaine d’auteurs de Michel Butor à Jean-Pierre Verheggen, en passant par Michel de Ghelderode, Marcel Béalu, Pierre Dhainaut, André Schmitz, Bernard Noël, Jude Stefan, Gérard Prévot, (on ne saurait les citer tous), sont étudiés ici avec le brio d’un professeur rompu à la promptitude dans l’aperception et le rendu des textes.

On sent en l’auteur un homme très enthousiaste, non seulement de sa profession d’enseignant, mais encore de la littérature, en laquelle il ne voit point, contrairement à un Bossuet, le moyen de combattre l’ennui : « cet ennui inexorable qui fait le fond de la vie humaine » ;  mais bien plutôt à l’instar de Paul Vandromme, un mode de vie, un style, une attitude, faisant de l’écrivain un personnage singulier qui mérite que l’on s’arrête à l’originalité de ses vues, ses phantasmes et phobies.  L’auteur, par le sérieux de son ouvrage, atteste que la littérature est l’expression la plus accomplie de notre humanité, l’occasion pour l’écrivain de produire la meilleure part de lui-même.

« A un moment où le latin s’efface de plus en plus de nos pratiques culturelles et scolaires, écrit-il dans « Quelques notes en marge de l’œuvre de Georges Thinès », quand l’obscurité sur notre passé tend encore à croître, stèle parmi les stèles sur laquelle se gravent et s’effacent des lettres que l’on ne saisit plus qu’à peine, la parole d’Ovide, « instant d’oiseau », nous revient d’outre les siècles par maint sentier détourné.  Elle nous hante, nous précède.  Qu’elle ne nous éclaire plus guère n’a guère d’importance quand elle nous amène au moins à chercher encore la lumière où il semblait ne plus y en avoir ».

Roboratives paroles d’ humaniste.

Marcel Detiège