Thomas Costenoble/Jean-Luc Bodeux, Bières et brasseries de Wallonie, en provinces du Hainaut et du Brabant wallon, photos de Noé David. Weyrich, 230 pp, 33 €.

Une très belle édition, qui vaut autant par son sérieux professionnel que par l’agrément de la lecture. Pour chaque brasserie étudiée, l’auteur non seulement nous raconte les circonstances de sa création, les détails de son histoire, mais aussi le volume de sa production, les différentes sortes de bières qui sont mises en vente. Les photos sont superbes, et vous mettent…la bière à la bouche.

Il ne faut pas oublier que le Hainaut est celle de nos provinces où se trouve – et de loin – le plus grand nombre de brasseries. Le Brabant navigue loin derrière, mais c’est vrai qu’il revient de loin, même si depuis une décennie ou deux, il a repris du poil de la bête. La bière tenait déjà, au Moyen-Age, une grande place dans nos régions. Cette place ne fit que s’accentuer au fil du temps, mais cette histoire fut marquée par quelques épreuves difficiles à surmonter: ainsi, lors des guerres de 1914 et 1940, l’occupant réquisitionna la plus grande part des cuves – comme il fit d’ailleurs pour les cloches – pour alimenter son industrie d’armements. Il y eut bien sûr aussi les grandes crises économiques, 1929 et 2008, qui causèrent la disparition de nombreuses brasseries.

Par contre, parmi les éléments favorables, il faut noter l’esprit d’équipe, l’amitié, la bonne entente familiale, – les photos en témoignent abondamment, mais aussi le progrès technique. Il est frappant de voir le nombre de brasseries qui ont pris naissance suite à l’utilisation, par des ingénieurs agronomes, de kits permettant la fabrication de bière à petite échelle, production qui s’étendit ensuite par l’achat d’un matériel permettant d’étendre la production. Le nombre de « mordus » ne manqua pas de s’étendre, et là-dessus vint souvent se greffer bien souvent la fierté locale ou régionale: le nom même de la brasserie ou de ses brassins e témoigne souvent. Il y eut aussi les grandes compétitions internationales, surtout aux Etats-Unis, ce qui amena nos brasseurs à produire des bières fruitées, qui avaient la préférence en ce pays. Enfin, il n’y eut pas que les agronomes: les fermiers également, assez souvent Flamands d’origine, qui disposaient de locaux assez vastes, furent souvent de la partie.,

Quant aux brasseries plus importantes, c’est notamment grâce à l’achat de matériel lors de l’arrêt d’une brasserie concurrente qu’elles purent s’équiper. A partir d’un certain chiffre d’affaires, les géants de la bière guettaient d’ailleurs leurs petits frères au coin du bois, Jupille et Leffe en font foi….Last but not least: un nombre important de brasseurs se sont mis à planter du houblon, à s’interroger sur le choix des variétés, de même que sur le malt, l’orge, l’avoine…L’écologie y trouva son compte, et l’on remit aussi en valeur des variétés oubliées, comme la belge ou la saison.  Le rôle des pico-ou micro-brasseries fut là très important.

Notons enfin que si de rares brasseurs visaient uniquement le gain financier, ils en furent souvent pour leurs frais, tandis que par ailleurs, d’autres, plus altruistes,, y virent surtout l’occasion de donner leur chance aux jeunes, ou même d’employer des handicapés légers.

Parmi les réussites les plus belles, ou les plus originales, j’ai surtout noté les bières d’abbaye, bien sûr, la brasserie Desevaux à Boussu, qui utilise du sarrasin, la brasserie Dupont à Tourpes, où mûrit la moinette, établie dans une ancienne ferme, et qui fut dirigée par une maîtresse femme, Sylva Rosier, la Saint Feuillien au Roeulx,, la Brasserie de Silly, l’une des plus florissantes, la Chambourlette à Mons, dans le complexe des Grands Prés,dans les installations d’un grand magasin où ont également trouvé place une chocolaterie artisanale et une boulangerie itou, la Wallonne à Charleroi, la brasserie de Cambron à Peri-Daiza, la brasserie Dubuisson à Pipaix (la Bush, bien sûr) la Brasserie Caulier à Bon-Secours, la Brasserie à vapeur de Pipaix, la Quintine à Ellezelles, bien d’autres encire….Pour le Brabant: la Brasserie du renard à Pecrot, la Brasserie Brasse-Temps à Louvain-la-Neuve (cuvée des Trolls), la Gueuzerie Tilkin à Bierghes, la Brasserie Lefèbvre à Quenast, où mûrissent la Floreffe et la Barbar, la Brasserie de Waterloo, la Belgo Sapiens à Nivelles et ses canettes. Voilà! J’en ai passé beaucoup, et des meilleures! Je vous les laisse découvrir, et faire votre choix, ou plutôt vos choix, car un seul n’y suffirait guère!

Paru précédemment: Bières et brasseries de Wallonie en provinces de Luxembourg, de Liège et de Namur.

Joseph Bodson