Martine Rouhart, Dans le refuge de la lumière , éd. Bleu d’encre, 2020,12  €

Là où va l’oiseau, va Martine Rouhart pour exister dans sa propre vérité lumineuse.

Revisitant ainsi l’invention de Guillaume Apollinaire, elle crée, parmi ses autres mots, de superbes oiseaux-calligrammes :

« Portes et fenêtres/s’ouvrent/avec des bruits d’ailes/poussées par le vent/les maisons des oiseaux s’effeuillent » ( l’effet visuel est à observer dans le recueil lui-même).

D’instinct, l’auteur rend le lecteur participatif, l’invite au voyage d’être et de vivre en poète.

A mi-chemin entre la contemplation émerveillée et le souci d’être vraiment, confrontant le merveilleux à la réalité, sa poésie me fait penser à celle d’Odilon-Jean Périer, le poète « promeneur », révélant ainsi également l’importance du sens profond de la communication personnelle :

« On a parlé/on s’est tu/attentifs/au surgissement de tout/les presque rien/qui bougent à peine/le grelot d’une joie/qu’on ne comprend pas ».

Toute en nuance dans ses surprises (parfois aussi d’elle-même), elle exerce sur le jeu poétique une maîtrise aboutie jusqu’à évoquer le sens donné à la ponctuation.

Avec ces « trois fois rien » placés au bon endroit au bon moment dans la matrice du recueil, Martine en dit beaucoup et il y a chez elle de beaux aveux tranquilles à révéler l’instant primordial quand « passe un oiseau blanc ».

Certes, la poète ne peut être fleur (« je ne peux être fleur »), mais elle est déjà tellement oiseau, qu’ange parmi les mésanges, elle les voit de haut !

Depuis le bleu du ciel, son ressenti, à l’instar du vol des oiseaux, accentue la puissance des rayons solaires, sachant l’importance qu’a la poésie à faire « palpiter le fil gracile » de la vie, à travers cette fois, sa plume d’auteur.

Réfugiés dans la lumière « les oiseaux se défroissent » à devenir des sortes d’origamis à l’envers, dépliés dans le sens de leurs évocations poétiques suscitant l’émerveillement d’ailes à faire frémir l’instant essentiel qui mêlera son vertige personnel aux mystères d’un monde sans cage :

« De mes mains/ s’échappent des oiseaux/impatients/de refleurir mes jardins/d’images » dit-elle en totale offrande d’elle-même.

Patrick Devaux