Alain Delbrassine Réflexions de l’index éditions Cactus Inébranlable (59 pages, 2025, 12 euros)
Les réflexions et aphorismes d’Alain Delbrassine tiennent de la fulgurance. Sans doute mène-t-il le lecteur avec doigté en montrant de l’index ce qui fait partie de son essentiel ; « Ma main/Une table de multiplication » dit-il. On le croit sur paroles lorsqu’il nous annonce que « la pléthore d’informations rend le monde informe » tandis que lui-même se joue des miroirs pour donner également de multiples facettes de lui-même. Son contre-temps peut faire penser aux surréalistes et plus particulièrement à la gestuelle de Nougé quand, par exemple, il nous affirme que « la nuit est une tasse de café », Nougé étant réceptif aux objets et récipients comme peut l’être également un poète comme Marcel Peltier ( avec « Ma tasse ébréchée j’y tiens »).
Pour lire Alain il faut procéder entre chaque maxime à une sorte de vide qui devient rapidement vertigineux lui qui sait qu’ « une éclipse peut en cacher une autre ». L’aphorisme se veut parfois philosophie pure ou jeux de mots et de sons activés dans la vie de tous les jours : « Pouvez-vous m’écrire maigrir/ sans m’aigrir ? » tandis que dans la même réflexion l’auteur peut juxtaposer le corps et l’esprit : « Le muscle peut servir de hamburger/ alors que la pensée sert à gamberger ». Un formidable dessin de couverture signé DeLucynsky ( Lucy Delbrassine, sœur de l’auteur) semble suggérer les synapses chères aux habiles réflexions de l’auteur donnant bien cette idée de corps-esprit : « Le burnout est l’élégance du corps sur l’esprit ».
L’auteur a cette délicatesse de prévenir son lecteur pour ce qui concerne la durée de prise de conscience de ce qu’il dit : « Le temps de la réflexion/Ne doit pas excéder celui/du saut en parachute » .Voilà une formulation de lente descente à apprécier avec le contexte de quelques paysages d’esprit fort variés et surtout fort à propos.
Patrick Devaux