Ariane Fradcourt, Jacques Toussaint, 50 ans de création, Marie-Paule Haar, Namur, Art & Héritance, 2017, 160 p.

La monographie consacrée à Marie-Paule Haar (Anderlecht, 1940 ; vit et travaille à Genval) se veut la plus complète possible pour parcourir les 50 années de création de l’artiste. Les illustrations sont nombreuses ; les disciplines pratiquées prouvent une inventivité ouverte : peinture, dessin, orfèvrerie, bijouterie, numismatique.
L’essentiel de son travail pictural sera figuratif et sa sculpture sera abstraite. Son passage à la Cambre où elle eut, entre autres, Félix Roulin comme professeur, et les découvertes esthétiques proposées par la fabuleuse Expo 58 ont été déterminantes dans son orientation artistique. Cette diversité atteste que la créativité de Haar n’a jamais cessé de se renouveler.
Si la peinture n’a pas été la part la plus importante de son parcours, elle s’avère originale dans la mesure où elle fait parfois allusion à la sculpture. Il lui arrive en effet d’associer toile peinte et feuilles de plomb. C’est le cas pour un diptyque qui présente de manière un peu ironique le ménage princier de Laurent et de sa femme comme sur les boîtes de biscuits Delacre.
L’utilisation du diptyque allie une fragmentation d’images reprises à partir de photos comme si il s’agissait pour l’artiste de moyens « qui déconstruisent la première fausse impression de familiarité avec le sujet ». Parfois la toile est divisée en quatre, un couple étant fragmenté en deux parties, torse d’un côté, jambes de l’autre, séparé par deux espaces monochrome. Parfois un ou des mots s’inscrivent dans un paysage.
Pas question donc d’un réalisme primaire mais bien une utilisation de l’espace afin de souligner la réalisation picturale. Sans doute aussi le désir de varier les points de vue, de se servir d’une mise en regard qui n’est pas sans rappeler une succession de moments telle qu’elle nous est familière au cinéma. Une manière de faire apparaître en peinture l’invisible de l’écoulement du temps et de suggérer le mouvement de l’action.
Les matériaux de sa sculpture sont l’acier, le plomb, l’aluminium, l’inox, le bronze, le bois, le plexiglas. La plupart des compositions réalisées se caractérisent par des formes simples, épurées, géométriques, que ce soient de petits formats ou des œuvres monumentales destinées à l’espace public.
L’abstraction sied bien aux structures qui soit contrastent avec un environnement végétal, soit s’harmonisent avec la géométrie inhérente à toute architecture. La rondeur, la courbe sont des formes qu’affectionne Marie-Paule Haar. Ce qui ondule, tourne, vire, indique que la trajectoire joue le rôle de la mobilité dans des compositions associées à des parois, des murs, des angles.
Ces derniers, signes d’une austérité calculée, dialoguent alors avec la sensualité du reste de l’oeuvre qui s’exprime plutôt dans le débridé. Rigueur et liberté se conjuguent comme dans la vie réelle où les humains partagent leur existence entre réflexion et sensation, pensée et sentiment.

Michel Voiturier