Henry Raveline, Contes borains – volume 4, Ël cu dë l’ mande, Société de langue et de littérature wallonnes, Université de Liège, place du XX Août, 7, 4000 Liège. Edition, traduction et notes par André Capron, avec la collaboration de Jean-Marie Pierret. Illustrations de Nelly Vaeremans et Marius Renard.raveline

André Capron arrive ainsi à la fin de ce long travail, et l’on peut dire qu’Henry Raveline lui est grandement redevable, pour l’intérêt, le soin, l’attention qu’il a portés à son œuvre.

Il est vrai, comme le signale la préface, que les femmes, les prêtres et les religieuses ne sont pas gâtés en ces contes, et que la scatologie est parfois de la partie, ainsi dans la dernière nouvelle…Mais nous retrouvons là une constante de la littérature populaire, en français comme dans d’autres langues, et aussi bien au 17e, au 18e siècle qu’au 20e ou à la Renaissance: Rabelais n’est jamais bien loin. Par contre, la langue de Raveline, comme celle de ses prédécesseurs, est drôlement savoureuse, et les amateurs de vert langage y trouveront amplement pâture à leur goût: tenez, à la page 30, ce portrait de Djan Biscaye, dans L’évèke éyét l’ crikion: I pôrtôt s’ panche come ène erlike. N’est-ce pas tout dire en un seul mot?

En quelques lignes, il trousse le portrait et la biographie du personnage, pittoresque et concrète, à tel point qu’on ne risque pas de l’oublier. Mais on trouve aussi chez lui, parfois, une certaine profondeur psychologique, faite de bon sens et de fatalisme. p.67: Mès qui ç’ qui sarôt dire ayuce qué l’ plêzi couminche  ét ayuce qué l’ chagrégn finit? I n’a fok yeûs’ in l’ cwêr dès djins: i s’ mêl’té; i l’ rimplit’. On brêt d’ plêzi; on brêt d’ chagrégn èyét on brêt co quand on spère. Rabelais ne disait pas autre chose en narrant la naissance de Gargantua…

Des récits que l’on dirait tout droit sortis de l’antre d’une sorcière, parfois , à moins que ce ne soit du gîte d’un lièvre miraculeusement doté de la parole. Leur naïveté, leurs ruses cousues de fil blanc vous feront peut-être sourire, mais je vous assure que vous y trouverez beaucoup de plaisir.

Les dessins sont d’une grande finesse.

Joseph Bodson