Patricia Ohles-Simon, So l’ ploume dès sintimints, poèmes. Clément Muller, Lu bwas èmacralé, conte en vers. Rwayâl Club Walon, Scriyadjes d’ir èt d’û. Illustrations de Denise Mossoux et Marceline Schmidt. Malmedy, rcw.be. Place du Châtelet, 11, 4960 Malmedy. 14,31  €, compte BE 25792528963482.

Ce volume constitue le n°1 d’une nouvelle collection, Scrièdjes d’îr et d’û, Ecrits d’hier et d’aujourd’hui, deont le principe est de mettre en valeur à la fois un texte contemporain et un texte plus ancien. Il remplace cette année le volume annuel du Vî sprawe.

Les poèmes de Patricia Ohles-Simon sont d’une grande légèreté de touche, ils abordent sans avoir l’air d’y toucher des sujets très profonds. Des évocations brèves, légères, axées le plus souvent sur la fuite du temps, une grande sensibilité à la nature, le regret surtout de l’enfance perdue. Non pas l’habituel passéisme qui retombe éternellement dans les mêmes vieilles déplorations, mais des évocations de l’enfance d’une grande fraîcheur, qui nous la font respirer soudain, comme si une porte mystérieuse, devant nous, s’était ouverte. Ecoutons la plutôt:

Roûvyî: Roûvyyî lu ci k’on-z-èst, wice k’on va, d’wice k’on vint/Roûvyî l’ djoûr d’âdjoûrdu, èt méme roûvyî dumin,/Dwarmi d’on doûs somèy, long èt lîbèrateûr,/Ki candj’reût è sugondes lès djoûrnés èt lès-eûres…//Totes cès-eûres, là k’l’anôye/Prind l’ pus bèle pârt do l’ vôye;/Roûvyî tot do passé, roûvyî tot do prézint,/Tchèssî du nos-esprits lès dotes èt lès toûrmints;/Roûvyî èt co roûvyî, èt rutrover doûç’mint/Cisse bèle paye dol èsprit, ku seûls ont lès gamins.

Une voix que l’on n’oubliera pas.

Quant à Clément Müller (1873-1949), il produisit en 1893 un nouveau dictionnaire wallon-français. Lu bwas èmacralé  parut dans l’annuaire de la Société liégeoise de linguistique wallonne de 1894, et une version revue et corrigée par l’auteur dans l’Armonac walon po l’ samène po l’an 1895. Le genre a il est vrai un peu vieilli et n’est plus guère usité aujourd’hui, mais ici, il garde son charme, et se laisse lire agréablement: une certaine naïveté même ne le dépare pas. On y relève d’ailleurs des expressions savoureuses: ainsi, j’ai noté, p.49, mére Dju seû (serait-ce l’origine de mièrseû?), et aussi, ènnaler à l’ bone môrbleuse, dans le sens de s’en aller nonchalamment: des expressions que l’on remettrait avantageusement en usage. Pour le reste, une grande simplicité, un naturel parfait, bref, tout ce qui convient aux histoires de sorcières et de sorcellerie. Les amateurs seront gâtés…

Joseph Bodson