Martine Roland, Barnabé, c’est moi!, roman, éd. academia,176 pages, 18 €

Sous la forme d’une fiction romanesque, l’auteure aborde une foule de sujets de société, de l’enfance maltraitée et abusée à l’alcoolisme et au chômage, de la maladie et de la mort, (subie ou donnée pour abréger les souffrances) à l’amour (maternel, fraternel, amical, animal…), de la religion à la bigoterie, de l’éducation des enfants à la cruauté, délibérée ou inconsciente, de la résilience, possible ou non, du deuil à l’obsession confinant à une forme de folie niant l’évidence… Et la liste n’est pas close.

Le narrateur, Barnabé X, huit ans, arrive dans sa troisième famille d’accueil, après avoir vu et fait le pire chez ses pochtrons de parents biologiques. Il est séparé de sa petite sœur Myriam, placée ailleurs, et fait connaissance avec Adèle et Albert Brichot, ses parents de remplacement, qui ont perdu un fils de cet âge il y a dix ans, ce dont Adèle ne se remet pas. Barnabé a la sensation très nette qu’il n’est là que pour remplacer ce fils perdu, et participe à la vénération de la mère, qui se rend chaque jour au cimetière. Il fait de son mieux pour s’intégrer, mais veut conserver son identité. Car il n’a pas pour rôle de reprendre la vie de Rémy là où il l’a quittée. À ce propos, j’aurais préféré le titre Moi, c’est Barnabé ! Toute l’histoire tourne autour de l’évolution de ses relations avec Adèle, Albert gardant une amicale neutralité face à l’attitude de sa femme, gentil mais faible. Au cours des années, Barnabé découvrira les dessous de sa famille d’accueil et devra la quitter suite à une farce macabre, mais ce sera pour connaître enfin des jours meilleurs. Bien meilleurs qu’il n’avait osé l’espérer. Une histoire assez sombre au total, avec une happy end, mais assortie d’une autre fin, beaucoup plus trash, celle-là, et qui me laisse sceptique. Ne dévoilons rien, gardons le suspense.

Traiter autant de sujets délicats dans l’espace réduit d’un roman fait qu’ils se heurtent un peu, quoique habilement imbriqués les uns dans les autres, et qu’ils ne sont pas approfondis et nuancés comme ils auraient pu l’être. Ce roman, agréable à lire, peut donner l’impression d’un roman écrit pour la jeunesse, mettant en scène tout un éventail de situations et de faits de société, pour faire réfléchir et guider le lecteur, montrant à la fois les conséquences des actes posés délibérément, surtout à l’égard d’enfants, et les accidents de vie qui peuvent orienter un destin indépendamment de nous.

Isabelle Fable