Florence Noël, Branche d’acacia brassée par le vent  Huit mouvements;    éditions Le chat polaire 2020

 

Branche d’acacia…à laisser bruire avec la lèvre qui tremble, une lèvre qui frémit de sa prière, non de frayeur, bien sûr, mais d’un immense étonnement qui sonne juste dans la moindre note.

A lire profondément en soi-même, là où se trouve aussi autrui pour qui comprend cette partie de l’être aimé qui vit en soi en sachant ressentir « le précipité de la (ta) silhouette, sa course projetée contre les tessons de pierre ».

Le recueil alterne prose et texte court bruissant l’écho, rythme des mots s’accomplissant en progressivité musicale pour exalter la joie : fugue, sarabande, adagio, menuet, andante cantabile jusqu’au miserere.

Fraternelle, la poète se demande « à quel frère consolant reviendra la (ta) peau d’âme retournée ».

 

Notre époque – et surtout ces jours-ci – ressentira sans doute, à plus d’un titre, la lumière dans la plaie, avec cet étonnant regard qu’a cette poète désormais confirmée de fait par la multiplicité de ses langages allant tous dans le sens d’une Humanité épanouissante.

C’est qu’elle n’est pas l’enchanteresse d’un moment ; Florence a en elle cette incantation profonde d’être de laquelle peu d’êtres peuvent se revendiquer.

La Nature n’est jamais loin dans ses propos d’où se diffuse une douce profondeur de la Genèse : « Viendra le voile tiré sur l’ecchymose d’une nuit – la première – le ventre né du grand azur, l’aube dit-on, et son cortège d’oiseaux crachés sur les visages, viendra l’heure… ».

 

Parfois quand Florence parle, sa lèvre tremble légèrement ; elle émet une vibration qui ressemble à la feuille (d’acacia ?) sur l’arbre quand elle ressent, je le crois, une sorte de soleil. Avant de répondre à une question, elle dégage une sorte de pause silencieuse qui ressemble tellement à son écriture !

La lisant, j’ai songé à feu mon ami le peintre Lode Keustermans qui, naguère, exposa quelques œuvres monumentales dans la cathédrale Sainte Gudule, à Bruxelles. C’était un passionné du « Cantique des cantiques ». S’il m’avait appris à approcher la peinture, Florence nous exerce à voir de l’intérieur, « filtrant l’ébriété nouvelle des branches ».

 

Huit photos de Pierre Gaudu ajoutent, en noir et blanc, un effet flouté suggérant le brassage du vent et accompagnant cette idée de s’en référer au « Cantique des Cantiques » : « Lève-toi, mon amie, ma toute belle, et viens » (chapitre 2,1-10), une des théories pour expliquer le « Cantique des Cantiques » relevant de la présence de l’univers tout entier dans l’Homme.

Florence a ajouté une poésie personnelle interprétative à partir de ce texte grandiose.

Patrick Devaux