Urgence poétique – orchestrée par Laurence Vielle et Corentin Lahouste, Carnet d’atelier, Presses universitaires de Louvain, 2020.

On situe aisément Laurence Vielle, que l’on a connue à ses débuts aux côtés de Monique Dorsel, fondatrice du Tthéâtre-poème de la rue d’Ecosse à Bruxelles ; outre sa fréquentation des tout grands noms du théâtre et de la création artistique, outre le Prix Charles Cros, Laurence Vielle fut encore récemment choisie en qualité de poète de l’année dans notre pays. Elle a enfin été en résidence à l’UCLouvain « qui a souhaité inscrire la culture non pas à la marge mais au cœur même de la formation, de la recherche et du service à la société, soit les trois principales missions de l’Université (…). Chaque artiste accueilli par l’UCLouvain anime un séminaire qui s’inscrit dans la « mineure en culture et création (…). Le présent livre s’inscrit dans cette dynamique » (préambule des professeurs Frédéric Blondeau et Ralph Dekoninck).

En écho aux multiples urgences qui se posent à nous à bien justes titres (climatique, sociale, environnementale …), ce mini-livre entend métamorphoser nos êtres en péril et, plus concrètement, garder une trace des impulsions instillées aux participants des « Master classes » orchestrées – c’est le mot du sous-titre – par la parole suscitée et libérée : cette parole sera-t-elle aussi celle de la résilience, même si le programme n’évoque pas trop explicitement une dimension thérapeutique ? L’enthousiasme, du moins, semble être sorti gagnant des échanges et il faut, de toute évidence, souligner en leur faveur la qualité de la mise en page, du graphisme, de la typo et des collages, tous résolument novateurs et qui sont à complimenter.

Pour autant, cet enthousiasme est-il forcément communicatif voire contagieux ? Il faut toujours tenir compte de la dimension renforçatrice existant, lors de séminaires, par la perspective d’un rayonnement par l’aboutissement publié et la jubilation issue de l’expérience de groupe.

Le plus grand nombre des lecteurs de poésie l’imaginent encore selon des critères absents dans ces pages où, loin des références thérapeutiques donc, pointe cependant un zeste de ces associations libres – quoique légèrement monitorées – qu’on trouve dans les « matériaux poétiques » des participants.

Ainsi découvre-t-on une poésie assez insurrectionnelle (sic) plutôt éloignée de sa dimension contemplative à laquelle pense traditionnellement accéder le (déjà) rare public des lecteurs : sans doute faut-il rudoyer quelque peu ces attentes d’un autre âge, mais l’ambition semble également vivace de conquérir l’adhésion malgré de salutaires secousses adressées aux acquis périmés !

Or, les définitions successives qu’on propose ici pour le mot poésie sèmeraient plutôt le trouble de par leur diversité (apparition soudaine, atteinte de la vue, masque revêts-le, échappe-toi !) mais se rallient finalement autour d’un concept heureusement rassembleur :

La poésie est un étonnement perpétuellement réengagé                                                                                                                                                             Pierre Guérande