Michel Jamsin, Dessins du confin-âge, Strepy Braquegnies/Brugelette, Le Livre en Papier/M. Jamsin, 2020, 164 p. (20€)

 

Instantanés dessinés ou peints au plus vif du moment

Michel Jamsin (Fléron, 1941 ; vit et travaille à Brugelette) pratique la peinture depuis toujours. Il a participé au groupe néo-expressionniste Maka (années 70-80). Il a enseigné le dessin durant plusieurs décennies à l’Académie de Mons. Il a tâté de l’écriture notamment au théâtre. Pas étonnant qu’il profite du confinement pandémique pour rassembler 164 dessins récents accompagnés de leur commentaire.

Son credo est : « La déformation graphique de la réalité peut être affirmée et libre. Depuis le dessin enfantin jusqu’aux expressionnistes les plus puissants en passant par les stylisations tribales, il s’agit de reconstruction expressive de la forme ». Dans ce livre, il a accumulé des images dont « Le graphisme est tumultueux ». Elles sont composées d’un trait à la fois décontracté et énervé qui s’assimilerait volontiers à certaines productions murales du street art. On y pressent l’impulsion du moment, la poussée spontanée qui se sert de tracé happé par la page, de « traits qui sont comme des lames qui décrivent davantage l’énergie que la forme » pour jeter des impressions, des sensations, des émotions car il est surtout question d’ « Évocation plus que de représentation ».

La quasi totalité est consacrée à des personnages humains. Tous, même ceux des portraits, sont saisis en mouvements, ne serait-ce que dans l’action de regarder car l’expression de leur visage suppose une réaction à ce qui est vu et qu’il devient possible d’imaginer tant les éléments de leur physionomie sont démonstratifs. Chez Jamsin, « Tout concourt à dynamiser la scène ».

Chaque tableautin est désigné par un titre surmontant une courte légende. Concernant le premier, le dessinateur prévient que « Les titres donnés aux œuvres d’art n’éclairent pas toujours leur sens. Il s’agit souvent d’un nom pour le catalogue ». Quant à la seconde, le plus fréquemment, c’est une notation attirant l’attention sur un élément, un procédé du dessin, sa portée symbolique ou allégorique, réminiscence de la pratique pédagogique de l’artiste qui signale se servir de « gestes organiques » ou de « synthèse organique », d’ « échos vibratoires », de « lyrisme de la touche », de graffiti hasardeux », de « géométrie expressive ».

Il lui arrive aussi de suggérer une réaction, d’émettre une hypothèse réaliste ou farfelue, de suggérer une comparaison, de se référer à un épisode de l’histoire de l’art, de se ou de nous poser une question, d’ajouter une pointe d’ironie. Quelquefois, cela vire du côté de la saynète, du dessin humoristique caustique avec réplique ou dialogue à moins qu’il ne s’agisse d’un glissement vers l’absurde. D’ailleurs, s’interroge-t-il : « Quelle est la limite entre la caricature et la stylisation expressionniste ? »

Michel Voiturier (01.12.2020)

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